Hier chercheur en relations internationales, aujourd’hui chef au restaurant À La Piscine à Lyon, Benjamin Sanchez revient sur l’histoire de sa reconversion, ou quand la passion devient profession.
« J’ai fait de longues études en lettres puis en histoire. Progressivement, je me suis orienté vers les relations internationales. J’ai travaillé sur l’Iran au travers des sciences religieuses puis dans le domaine de la défense. Tout ça, c’était plus par curiosité que par véritable passion. Ces domaines ne me procuraient pas une énergie vitale…
En revanche, j’ai toujours été un amoureux de la bonne bouffe. La question d’une reconversion autour de la cuisine m’est progressivement apparue. J’ai pris le temps d’y réfléchir, me demandant si ce n’était pas une lubie. Pour me rendre compte de la réalité du métier, j’ai fait quelques extras tout en restant en poste. J’ai eu l’occasion de me tester lors d’événements ou de festivals. Alors, il y a eu comme une évidence. Je vibrais beaucoup plus en cuisine qu’ailleurs et je ne me voyais pas retrouver la rythmique de la vie de bureau. La décision était prise. Même si je n’avais aucune idée de ce que pourrait être le boulot derrière les fourneaux, je me suis lancé. J’ai décidé de plonger directement dans le grand bain.
Ce n’est pas par excès de confiance que je n’ai pas suivi de formation académique. Ayant fait de longues études, je n’avais pas envie de retrouver un système didactique et préférais forger mon expérience sur le tas. De nombreux professionnels m’ont conforté dans cette décision. Finalement, j’endossais le rôle d’apprenti à leurs côtés. Ils savaient que mon envie comblerait mon manque d’expérience et que je serai là tous les matins pour travailler.

On m’a rapidement proposé une place de chef dans un Coffee Shop où la cuisine était assez simple. Durant un an, je suis passé de maisons en maisons, revenant au grade de commis pour apprendre et me former. J’ai également travaillé aux côtés d’un chef irlandais dans un bistrot, au restaurant Encore avec un chef japonais, à l’Agapé et au Garde-Manger. Je suis passé de commis à chef de partie, puis second et enfin chef à la Fine Mousse, un restaurant qui propose des accords mets & bière.
J’ai décidé de quitter Paris pour Lyon et ai obtenu un poste de chef de partie chez Mathieu Rostaing-Tayard au Café Sillon.
Quelques temps plus tard, j’ai été contacté par l’ancienne directrice du restaurant À La Piscine. Ils m’ont fait faire un service d’essai. Dans le restauration, ce n’est pas très courant de se voir confier les rênes de la cuisine dès la première fois. J’étais assez flippé et je savais qu’Andrea Petrini serait là pour juger mon travail. Il faut croire que je les ai convaincus car ça fait maintenant plus d’un an que j’y suis chef et que j’ai carte blanche !

Je me sens épanoui ici. Contrairement à Paris, l’arrière-pays est très accessible à Lyon, ce qui permet d’entretenir un lien de proximité avec les fournisseurs. Il n’y a pas forcément d’intermédiaires et je peux échanger directement avec le producteur.
Peut-être qu’à l’issue de cette expérience, lorsque j’aurais le sentiment d’avoir fait le tour, j’entamerais un voyage autour du monde pour faire des stages et découvrir d’autres cultures culinaires. Ici, j’ai la chance de recevoir de grands chefs étrangers qui viennent découvrir notre cuisine et qui me permettent de découvrir la leur. C’est très formateur et j’apprends beaucoup d’eux. Les automatismes, les techniques, les produits, la mise en oeuvre… tout peut varier d’un chef à l’autre. Avec eux, je voyage sans quitter ma cuisine.

Alors pourquoi ne pas m’accorder une césure pour en découvrir davantage aux quatre coins du monde ?
Je ne suis pas nostalgique de ma vie d’avant. Le métier de cuisinier mêle à la fois la création, l’observation, l’échange avec les clients comme avec les producteurs. C’est un artisanat qui nécessite une grande réflexion en amont. »
Restaurant À La Piscine
8, quai Claude Bernard
69007 LYON